(Matthieu 9, 27-31)
Est-ce la même scène que Matthieu reprendra (20, 29-34) en la situant à Jéricho ? Le geste de Jésus qui consiste à « toucher les yeux » sera évoqué pour les deux aveugles de Jéricho ; et cette redite pousserait le lecteur à croire qu’il s’agit bien de la même guérison.
Jésus voit la sincérité et la confiance de ces deux aveugles. Peut-être serait-on tentés de dire qu’ils ont « intérêt » à dire qu’ils donnent une réponse enthousiaste parce qu’ils désirent leur guérison…Ils ouvrent leur cœur à l’œuvre de Dieu. Ils croient en la « puissance » de Jésus : le titre qu’ils emploient pour attirer l’attention de Jésus sur eux prouve qu’ils pressentent en Jésus le descendant de David dans lequel la tradition annonçait le Messie. Sa réputation, déjà établie, de guérisseur, le laissait croire…D’ailleurs, Salomon, le fils de David, passait pour « guérisseur », comme le faisait croire un écrit (apocryphe) du moment, le « Testament de Salomon ».
Jésus n’est pas dupe de la visée messianique de ce titre à connotation politique ; Il lui préfère l’appellation « Fils de l’homme », « venu du ciel », selon Daniel 7, 13-14.
La parole de Jésus : « Que tout se passe pour vous selon votre foi ! » qui accompagne son geste annonce aussi les sacrements, où la parole souligne le sens de la « matière du sacrement ».
L’aboutissement de la parole de Jésus, la guérison, suppose la foi ; mais celle-ci doit se traduire en « conversion », non en tapage, comme c’est tout de suite le cas. En d’autres circonstances, Jésus demandera explicitement de « rendre gloire à Dieu ».
Cette guérison, au-delà même de tout ce qu’on peut ressentir pour le bienfait de « voir », nous fait crier, à nous aussi : « Prends pitié de nous ! » C’est un cri d’hommes conscients de leurs faiblesses, et de leur cécité spirituelle. La foi ne sera jamais assez profonde chez nous pour voir comme Dieu voit notre vie de pèlerins, infatigables dans leur marche. Dieu nous guérit et nous ouvre les yeux sur son « mystère ».
Aujourd’hui, nous ne risquons pas de faire entendre trop de propos qui « fassent connaître » Dieu, mais notre comportement traduit-il ce que nous demandons dans la première demande du « Notre Père » : « Que Ton Nom soit sanctifié ! », autrement dit qu’on reconnaisse la sainteté de Dieu à celle des disciples.